mercredi 25 juillet 2012

Taxes sur les Excédents Commerciaux

Une première objection sur cette proposition de TEC : je ne vois pas pourquoi on chercherait l'équilibre de la balance commerciale avec tous les pays avec lesquels nous échangeons ; je ne vois pas pourquoi on exigerait qu'un pays exportateur de petrole vers l'Europe utilise ses revenus petroliers pour importer des produits européens. Cela pourrait se justifier, mais avec des zones économiques d'une taille comparable avec celle de l'Union Européenne.


Fidèle à mes bonnes habitudes, j'ai fait mon petit calcul de coin de table sur la TEC telle que proposée par Laurent S.
Je rappelle que la variation de cette Taxe sur les Excédents Commerciaux est basée sur une formule de ce type :
T’=t+(T-t).ln(1+exp(-k.S))/ln(2)
dans laquelle :
T' est le taux de la taxe à l'année N+1,
T est le taux de la taxe à l'année N,
t est le taux vers lequel tend la taxe si les exportations sont excédentaires,
k est un coefficient de proportionalité asymptote entre le produit de la taxe et le déficit commercial,
S est le solde de la balance commerciale.

Les données Eurostat (extraction du 31 août 2011) donne pour l'Union Européenne à 27 un déficit commercial de -153 milliards d'euros pour 2010.
En 2006, le tarif douanier moyen appliqué par l'Union Européenne sur l'ensemble des produits (produits agricoles exclus) était de 3.9%. Considérons-le pour l'exercice uniforme à tous les pays : T=3.9%.

Bien entendu, nous n'avons pas le recul de plusieurs années d'évolution de la TEC, et son impact sur le solde des balances commerciales, mais nous pouvons commencer par regarder ce que cela donnerait pour la première année d'application (moyenne de la première année des scenarii dans lesquels la TEC aurait appliqué pour la première fois entre 2006 et 2010).

Si on cherche à atteindre la libre circulation des biens (t=0%), avec la valeur retenue par Laurent S. de k=0.119223, le taux de taxation moyen bondit de 3.7% à 24.6%, générant près de 303 milliards d'euros de recette supplémentaire... Brutal ! Les importations chinoises se retrouvent du jour au lendemain taxées à 94%.

En retenant t=3% comme taux cible en cas d'excédent commercial et la même valeur du coefficient k, on obtient une taxe d'importation moyenne de 7.6% et 64 milliards d'euros de recette suppleméntaire.
Si cette TEC avait été appliquée à partir de 2005 sans avoir d'impact sur les balances commerciales, les taux d'importation se seraient envolé de manière exponentielle (ce qui bien sûr rend caduc l'hypothèse de l'absence d'impact, vu les valeurs de taux atteint) :
Les taux d'importation s'envoleraient pour les pays avec lesquels notre balance commerciale est déficitaire, principalement les exportateurs d'énergie fossile et la Chine.

Concernant les pays dont nous importons notre énergie fossile (Russie, Norvège, Algérie, etc...), la taxe carbone me parait plus lisible que la TEC.
Concernant la Chine, nos échanges commerciaux ont atteint un tel déséquilibre qu'un système tel que la TEC ne me parait pas envisageable. Nous ne pouvons imaginer à court terme (re)fabriquer en Europe tous les produits que nous importons de Chine. Je pense que des taxes d'importations construites de manière raisonnée et transparente sont plus réalistes. Pour qu'un système tel que la TEC ne fasse pas exploser rapidement les taux d'importation des produits chinois, il faudrait adopter un coefficient k faible, ce qui rend le système moins réactif aux déséquilibres. La difficulté sera d'expliquer sur quelles bases on aura différencié le coefficient k selon les pays (par exemple k=0.01 pour la Chine, au lieu de 0.1 pour le Japon).

Après reflexion, les Taxes sur les Excédents Commerciaux ne me parait pas une proposition si intéressante. Elle ne retiendrait mon attention qu'à 3 conditions :
1) échanges avec des zones économiques d'une taille comparable avec celle de l'Union Européenne, en population et en PIB (ou nouvel indicateur économique plus pertinent).
2) taux cible t (taux vers lequel tend la taxe si les exportations sont excédentaires) construit de manière différenciée par pays, sur la base de critères tels que proposés ici.
3) coefficient k faible (typiquement 0.01), ce qui rend le système moins réactif aux déséquilibres et lui fait donc perdre son intérêt principal.
Finalemernt, la TEC ne serait qu'un moyen d'avouer notre manque de compétitivité comparé à d'autres économies. Mieux vaut s'attaquer au fond du problème, c'est-à dire réduire le coût du travail (cf. proposition de supprimer toutes les charges sur les salaires, en remplaçant charges sociales et CSG par une Taxe A la Consommation) tout en se protégeant de concurrence déloyale sur les sujets choisis comme prioritaires (des conditions de travail décentes, des exigences environnementales fortes, une fiscalité normale).

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