mardi 8 décembre 2015

justice climatique

La journaliste Emmanuelle Réju présente l'ouvrage "La justice climatique mondiale", d'Olivier Godard :

Imaginons un gâteau d'anniversaire à partager entre des enfants. D'évidence, une répartition juste et équitable de ce gâteau serait de donner la même part à chacun. Trop facile ! Et si les enfants n’avaient pas le même âge, ce qui induit des besoins alimentaires différents ? Si de surcroît certains avaient aidé à préparer le gâteau et d’autres non ? Et si l'un avait amené le sucre, l'autre prêté le moule ou le four ? Et si certains venus de familles aisées avaient l’habitude de manger de bons gâteaux, contrairement à d’autres enfants venues de familles plus modestes, qui arrivent le ventre vide ?


C'est les émissions cumulées de gaz à effet de serre qui importent pour évaluer le réchauffement climatique. Pour être plus précis, il faudrait également tenir compte de la durée de vie des différents gaz à effet de serre. Pour le CO2, ce qui importe est par exemple les émissions cumulées des 100 dernières années.


Si nous voulons limiter le réchauffement climatique à une hausse de 2°C, objectif fixé par la communauté internationale en 2009, nous ne pouvons, en gros, rejeter «que» 1000 Gt de CO2 d’ici à 2050. Depuis 2000, nous avons déjà émis plus de la moitié de ce quota.


L'étude des quantités d'émissions cumulées pourrait aider à répartir équitablement l'effort, ou l’attribution des parts du quota de ces 1000 Gt de CO2.


Nous savons que les émissions de CO2 cumulées présentent une courbe exponentielle, et atteignent un total supérieur à 2500 Gt de CO2 depuis 1750, dont 1300 Gt depuis 1980 :


Les émissions actuelles de CO2 sont très inéquitablement réparties, comme le montre cette carte sur laquelle la superficie de chaque pays est proportionnelle à ses émissions de gaz à effet de serre :


De même, les émissions historiques sont également inéquitablement réparties, et certains pays émergents utilisent cet argument pour limiter leurs efforts, ou le conditionner à l'aide financière de pays industrialisés depuis plus longtemps.


Sur le graphique suivant, l'annexe 1 regroupe les pays qui se sont engagés en 1990 avec des objectifs contraignants de réduction d'émission. En 1990, ces pays émettaient plus de 60% des émissions mondiales. En 2020 ils représenteront 35% et en 2035 20% des émissions mondiales.


En cumulé, les pays de l'annexe 1 représentent environ 600Gt et les autres pays 350Gt de CO2. Si l'on devait attribuer les 1000Gt encore permises pour que ces 2 groupes de pays arrivent au même total, on permettrait environ 400Gt aux pays de l'annexe 1 et environ 600Gt aux autres. C'est à peu de choses près la trajectoire prévue pour les émissions des pays de l'annexe 1, mais pas celle des autres pays.


Mais ces groupes de pays n'ont pas la même population, et on pourrait également le compter en quota de CO2 par personne. Un coup d’œil dans le rétroviseur paraîtrait raisonnable de limiter à 4 tonnes CO2 par personne et par an :

ceci recouvrant à nouveau une grande disparité entre pays:

4 tonnes de CO2 par an et par personne, avec une population qui resterait stable à 7 milliards de terriens, cela nous ferait consommer notre quota de 1000Gt en 35 ans : il faudrait donc descendre sous les les 4 tonnes de CO2 par personne et par an.


On voit que les émissions par personne sont relativement stables pour chacune des zones géographiques.

Evidemment, on ne peut pas demander à ceux qui émettent 12 tonnes de CO2 par personne et par an depuis 40 ans de rattraper leur "surconsommation" passée, notamment parce qu'il y a un demi-siècle les émetteurs de CO2 n'étaient pas au courant du problème, ou au tout début de leur prise de conscience.
Finalement, la répartition des émissions a fortement évolué ces 50 dernières années, avec un transfert d'émissions des pays occidentaux vers les pays émergents (la Chine en particulier) puis les engagements des pays de l'annexe 1 (qui pourtant pèsent de moins en moins dans les émissions mondiales).

Ceci limite la portée de l'argument de la responsabilité historique, et appelle chaque pays et chaque citoyen à prendre ses responsabilités.

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