vendredi 25 novembre 2016

émissions de CO2 et CH4 : série longue

Après s'être concentré sur les émissions de CO2, voici quelques données sur les émissions de CH4 :

On voit que ces 2 gaz n'ont pas le même poids :
* en 2010, le CO2 contribue à 56% du réchauffement global d'origine humaine contre 16% pour le CH4 ;
* en 2004, le CO2 pèse 76% des émissions de gaz à effet de serre, contre 14% pour le CH4.

effet de serre

Ici encore, Olivier Berruyer fait preuve de pédagogie :
À la base, l’effet de serre est un phénomène très positif pour nous, car il permet de réchauffer la Terre. Sans effet de serre, la température moyenne sur Terre chuterait à -18 °C au lieu de +15 °C (mais à cette température la glace s’étendrait sur le globe, renvoyant plus d’énergie dans l’espace, et la température se stabiliserait vraisemblablement en dessous de -50 °C).
Le principal gaz à effet de serre est la vapeur d’eau.
Le principal gaz à effet de serre d'origine humaine est le CO2, tant en contributeur au réchauffement climatique qu'en émissions :
Les origines de ces émissions sont multiples :

réchauffement climatique : série longue

Olivier Berruyer, sur son site Les crises, fait très bien le boulot. Je ne reprends que quelques graphiques et vous conseille la lecture intégrale de ce billet.
et la corrélation entre concentration atmosphérique de CO2 et température planétaire (cette corrélation ne démontrant pas la causalité) :

réchauffement climatique (2)

Cela s'ajoute aux données précédentes.

L'Arctique a connu en 2016 son printemps le plus chaud depuis qu'on y effectue des relevés météorologiques, selon le directeur de l'Institut Climat et Ecologie du Service de météo russe (Roshydromet) et de l'Académie des Sciences de Russie Sergueï Semenov.

Nouveau record en vue : 2016 devrait être encore plus chaude que 2015, selon l'Organisation Météorologique Mondiale.

En Arctique, la température excède actuellement la normale de 20°C.
Les relevés de l’Institut météorologique danois montrent qu’en novembre les températures journalières de l’air en Arctique ont excédé de 15 °C à 20 °C la moyenne de la période 1958-2012.

Dans le même temps, la banquise arctique, qui, après avoir atteint son minimum en septembre, se reconstitue ordinairement en cette période, ne regagne que très lentement du terrain, comme le met en évidence le National Snow and Ice Data Center américain.

jeudi 24 novembre 2016

Objectifs de Développement Durable 2015-2030 : croissance et climat


Je vois une contradiction profonde entre la croissance économique (cible :  taux de croissance annuelle du produit intérieur brut d’au moins 7 % dans les pays les moins avancés) et les mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques (sans objectif chiffré de réduction des émissions de gaz à effet de serre).



Je crois que ces 2 objectifs sont trop contradictoires pour nous permettre d'atteindre les objectifs ambitieux que l'on doit se donner pour que la vie reste humainement vivable sur Terre. Je crois que nous devrions travailler à améliorer l'efficacité énergétique du PIB, à réduire le contenu en CO2 de l'énergie consommée, et en même temps organiser la diminution du PIB mondial par habitant. C'est la conclusion à laquelle je suis arrivé à chaque fois que j'ai travaillé sur le lien entre PIB; consommation d'énergie, et émissions de gaz à effet de serre.

La courbe des émissions mondiales de CO2 permet d'ailleurs de retrouver les hoquets de la croissance mondiale :

retour à l'équilibre budgétaire

J'ai proposé plus tôt de revenir en 10 ans maximum à l'équilibre budgétaire. Ceci demanderait en gros d'atteindre un solde primaire (différence entre recettes et dépenses hors paiement des intérêts de la dette) nul d'ici 3 ou 4 ans, puis égal à 3% du PIB d'ici 6 ou 7 ans. Ensuite, il ne serait pas permis que le budget annuel voté par nos assemblées soit déficitaire. Cela exclut les Investissements à Très Long Terme (ITLT), pilotés par la Banque Publique d'Investissement.
Cela demande donc de réaliser de l'ordre de 10 milliards d'euros d'économies supplémentaires chaque année sur 10 ans.

10 x 10 = 100. Comment faire ?


Même si je rejette sur le fond le cadre primaire de leurs candidatures, d'autres arrivent au même chiffre de 100 milliards d'euros, mais vu uniquement comme 
duction de la dépense publique :

On voit la part prépondérante de la réduction des dépenses sociales. A contrario, mon programme consiste à financer autrement ces "dépenses", par une Taxe A la Consommation, même si cela n'interdit pas de travailler sur l'efficacité de ces financements, notamment pour la Sécurité Sociale, économies que les candidats à la candidature ont chiffré :

On parle aussi de réduction des dépenses de l'Etat par la diminution du nombre de fonctionnaires :
Le poids de la fonction publique est effectivement divers selon les pays, et la charge des pensions des fonctionnaires est difficilement  insoutenable. Mon projet inclut de réserver le statut de fonctionnaires à ceux qui assurent les fonctions régaliennes de l'Etat (armée, police, justice, impôts), tandis que les salariés des autres services publics (services sociaux, services de santé, éducation, recherche…) emploieraient des salariés du même statut que le secteur privé, et de désengager l'Etat des secteurs concurrentiels sans enjeu stratégique ou de long terme.

Enfin, la rationalisation est une source important de réduction de dépenses :
Je n'ai ici pas de projet détaillé sur les actions à mener... mais je vais réfléchir !

taxe carbone et importations (2)

Dans la mise en place d'une taxe carbone, il ne faut pas oublier les transferts d'émissions de gaz à effet de serre entre zones géographiques :

* à la fois des pays extracteurs d'énergie fossile vers les pays consommateurs d'énergie (par exemple 1023MtCO2 de la Russie vers l'Union Européenne, et 700MtCO2 du Moyen-Orient vers l'Union Européenne),


* et des pays manufactures low-cost vers les pays consommateurs de biens manufacturés (par exemple 380MtCO2 de la Chine vers l'Union Européenne).

A une taxe carbone sur l'extraction et l'importation des énergies fossiles, lourdes des émissions potentielle à venir, il faut donc ajouter une taxe carbone sur les importations de produits manufacturés, dont la fabrication a déjà causé des émissions de gaz à effet de serre dont nous subirons les effets pendants des centaines d'année.

Ma réponse est d'affecter à chaque produit importé un contenu de CO2 (celui qui a été émis lors de la fabrication de ce produit), et on appliquerait à cette importation une taxe carbone égale à la différence entre la taxe carbone appliquée dans le pays fabricant et le taxe carbone appliquée en Europe aux importations d'énergies fossiles.

programme politique de décroissance

Voici comment Serge Latouche envisage un programme politique électoral compatible avec la décroissance :
1) retrouver une empreinte écologique égale ou inférieure à une planète,
2) intégrer dans les coûts de transport le coût des externalités négatives,
3) relocaliser les activités,
4) restaurer l'agriculture paysanne,
5) transformer les gains de productivité en réduction du temps de travail et en création d'emplois,
6) impulser la "production" de biens relationnels
7) réduire le gaspillage d'énergie d'un facteur 4,
8) pénaliser fortement les dépenses de publicité,
9) décréter un moratoire sur l’innovation techno-scientifique.

lundi 21 novembre 2016

états d'âme politiques

Les grands partis semblent malheureusement verrouiller l'émergence de toutes nouvelles idées.

Je trouve nos candidats plutôt conservateurs et sans vision de long terme. Lénine promettait "Le communisme, c'est les Soviets plus l'électricité" : nos candidats nous font miroiter un retour vers les 30 glorieuses, l'internet en plus. J'aimerais quelqu'un avec un projet pour le long terme : un monde avec moins d'énergie fossile disponible mais plus d'attention portée à nos contemporains et aux terriens à venir.
Après le Brexit et Donald Trump, vu la faiblesse des projets en présence, je crains que beaucoup soient tentés par le repli sur une grandeur passée, en grande partie idéalisée.

Je n'espère pas un monarque.

Je cherche un entraîneur, qui saura choisir les meilleurs talents dans leur domaine et les faire travailler ensemble au projet dont il aura fixé les grandes lignes. Comme dans les disciplines sportives, l'entraîneur aura d'abord le souci de l'efficacité de son équipe et ne retiendra donc pas une individualité talentueuse incapable de coopérer avec l'équipe.

le vrai prix des carburants fossiles

Quand on cherche des informations sur ce sujet, on en conclut que la plus grande partie du prix de l'essence provient des taxes (en France au moins) :
Mais cela occulte les coûts des externalités négatives, les coûts invisibles des carburants : accidents de voiture, pollution de l'air, frais de fonctionnement des bases militaires pour empêcher les peuples des pays producteurs d'avoir le contrôle sur leur propre pétrole, subventions aux compagnies pétrolières.

Il y a quelques années, l'International Center for Technology Assessment a publié une étude sur le coût réel du carburant fossile, à une époque où le gallon d'essence coûtait 1$ à la pompe.

Les conclusions donnent un surcoût de 4.6$/gallon à 14.2$/gallon, fourchette large vue la difficulté à chiffrer ces coûts. Il ressort clairement que :
* les externalités négatives des carburants fossiles ne sont pas payées par les consommateurs : elles sont payées par les contribuables,
* environ 50% du coût de ces externalités négatives vient de la catégorie "Environmental, Health, and Social Costs of Gasoline Usage",
* environ 30% du coût de ces externalités négatives vient de la catégorie "Other Important Externalities of Motor Vehicle Use", qui rassemble le coût de la sécurisation militaire des approvisionnements pétroliers, le coût des encombrements de la circulation et des accidents de la route, et surtout le coût du changement climatique causé par les émissions de gaz à effet de serre (probablement très sous-estimé à l'époque, mais je ne parviens pas à trouver de mise à jour de cette étude).

Frank Shepard

samedi 19 novembre 2016

progrès et triptyque républicain

J’ai lu récemment un long article de Serge Paugam dont je reprends ci-dessous de longues citations. Raymond Aron, dans Les désillusions du progrès. Essai sur la dialectique de la modernité, paru en 1969, retient 3 contradictions fondamentales de notre modernité et de son lien au progrès, menant à des désillusions. Il est étonnant de constater que ces 3 contradictions se superposent aux 3 termes de la devise républicaine : notre modernité et son culte du progrès génère une tension autour de ces 3 idéaux.


Frank Shepard

L’égalité
L’égalité politique est le fondement du lien de citoyenneté, mais les inégalités dans le monde du travail sont en grande partie fonctionnelles. L’écart entre l’énonciation politique du principe d’égalité et la persistance d’inégalités économiques et sociales jugées injustes est à l’origine de nombreuses frustrations. Chaque individu est appelé à considérer ses compatriotes et, de façon plus générale, l’ensemble des hommes comme des égaux en droits, mais à rechercher en même temps à tirer le meilleur profit de ses propres capacités et compétences en se distinguant des autres, en poussant le plus loin possible la logique de la distinction statutaire. L’ambition prométhéenne et l’idéal égalitaire sont difficilement compatibles.

La liberté : dialectique de socialisation
Les sociétés modernes valorisent en même temps la transmission dans le cadre d’institutions dédiées, et l’autonomie des sujets. Dès 1893, Durkheim s’interrogeait sur cette simultanéité : « Comment se fait-il que, tout en devenant plus autonome, l’individu dépende plus étroitement de la société. » Le fonctionnement de l’économie moderne implique des formes de complémentarité entre les individus et les groupes et, par là-même, des formes nouvelles de dépendance à l’égard des institutions globales qui régulent la société. Cette dépendance peut être jugée excessive. Elle peut contraindre les individus en leur assignant des fonctions déterminées parfois mal ajustées à leurs compétences ou à leurs désirs jusqu’à étouffer leur aspiration à la liberté. Un ordre social cohérent et stable se heurte à la méfiance à l’égard des institutions trop envahissantes, entretient de façon presque mécanique le refus d’obéir, de se soumettre, et favorise la dénonciation de toutes les formes possibles d’aliénation.

La fraternité : dialectique de l’universalité
Le progrès scientifique, l’usage de techniques de production et de commercialisation toujours plus raffinées, l’homogénéisation progressive des modes de consommation et de communication conduisent inexorablement vers un monde globalisé, au moins virtuellement universel. Les peuples peuvent-ils s’opposer à cette évolution sans risquer de se marginaliser, voire de disparaître ? Et pourtant, les particularismes de toutes sortes – nationaux, régionaux, ethniques, religieux – ne cessent de se proclamer un peu partout dans le monde. Tout se passe comme si cette recherche identitaire fondée sur les traditions culturelles servait de contrepoint existentiel au mouvement de mondialisation et se traduisait dans les faits par des tensions et des conflits locaux.

progrès et décroissance

Mes contemporains et moi avons un a priori positif du progrès.

Avant le siècle des Lumières, les Hommes se faisaient l’idée d’un monde fixe, immuable et fini, cyclique comme les saisons. La notion de progrès, désignant à l’origine la marche en avant, est typiquement moderne. Concept central de la pensée des Lumières et des courants évolutionnistes, le progrès incarne la croyance dans le perfectionnement global et linéaire (voire exponentiel) de l'humanité. Mais le progrès est aujourd'hui presque uniquement associé à la technique. Le progrès économique englobe quant à lui de manière ambiguë à la fois l'idée de croissance (quantitative) et de meilleure efficacité (qualitative). 

C’est contre cette ambiguïté entre le plus et le mieux que s‘élèvent les objecteurs de croissance, qui remettent en cause la croyance magique dans le progrès technique pour apporter des solutions aux crises auquel il a grandement contribué : crises énergétique, écologique, financière, alimentaire (on pourrait prolonger la liste).

Plusieurs sites développent cette analyse du progrès :
La décroissance et l’idée de progrès : entre progressisme et conservatisme critiques
 

jeudi 17 novembre 2016

pétrole et entropie

Intéressant :

Un litre d’essence provient de 23 tonnes de matière organique transformée au cours d’une période d’un million d’années (Belpomme Dominique, Avant qu’il ne soit trop tard, Fayard, 2007).
Et chaque fois que nous brûlons un litre d’essence, nous avons besoin de 5 m2 de forêt pendant un an pour absorber le CO2 émis (Latouche Serge, Petit traité de la décroissance sereine, Mille et une nuits, 2007).

Ces deux chiffres illustrent les deux faces d’un même phénomène dévastateur. En amont de la consommation d’essence, le pétrole a nécessité des milliards de tonnes de matière organique et des millions d’années de constitution avant d’être extrait du sol. En aval de la consommation d’essence, les émissions de CO2 représentent des quantités phénoménales de Gaz à Effet de Serre (GES) que la nature doit ingurgiter d’une manière ou d’une autre, jusqu’à l’overdose.

Si je reformule :
d'un côté nous dépensons à grande vitesse ce que la Terre a épargné depuis des millions d'année, et nous laissons à nos descendants une gigantesque dette écologique sous la forme de pollutions diverses et de l'inertie de leurs effets (par exemple décalage temporel entre les émissions de gaz à effet de serre et réchauffement climatique causé par ces émissions).

Il nous faut vraiment re-penser notre rapport au temps long.

J'aimerai lire l'article titré "Entropie et flèche du temps : le rendez-vous manqué de la civilisation industrielle" :
La loi de l’entropie croissante, ou deuxième principe de la thermodynamique, est très précieuse pour comprendre la civilisation industrielle et son impact sur l’environnement global, le système Terre. Elle indique que l’énergie non renouvelable que l’activité humaine transforme se dégrade de façon irréversible. Mais des obstacles culturels profonds bloquent depuis la découverte de cette loi, au XIXe siècle, sa pleine réception dans les sociétés industrielles.

Nous n'avons pas assez conscience que notre civilisation industrielle repose sur la consommation d'énergie. En réalité, cette énergie ne disparaît pas (puisque le premier principe de la thermodynamique nous dit que l'énergie totale se conserve), mais l'entropie totale du système "Terre" augmente, augmentation irréversible comme l'indique le second principe de la thermodynamique.
C'est pourquoi on peut parler de crise entropique plutôt que de crise énergétique.

La seule façon connue de concentrer à nouveau l'énergie à haute entropie de nos émissions de CO2 industrielles dans un carburant fossile à faible entropie, c'est de passer par des êtres vivants, et beaucoup de patience bien sur. En effet, la réduction de l'entropie interne (au détriment de l'entropie externe, bien sûr) peut être retenue comme une caractéristique de la vie. En 1944, dans son livre "Qu'est-ce que la vie ?", le physicien autrichien Erwin Schrödinger introduit le concept de néguentropie, ou entropie négative, pour expliquer la présence de l'ordre à l'intérieur des êtres vivants et leur tendance à s'opposer au chaos et à la désorganisation qui régit les systèmes physiques.

Tout le problème, c'est que ce renouvellement des stocks d'énergies fossiles est un processus qui prend du temps, beaucoup de temps...

démarchandisation

Nous savons que l'indicateur PIB est biaisé car il ne tient compte que l'activité marchande, quel que soit impact (positif comme négatif) et pas activités non marchandes (enseignement, santé, mais aussi activités domestiques familiales comme l'éducation, le bricolage, l'activité potagère, l'entraide entre familles et amis, etc. : services non marchands mais producteur de liens, de sens, de valeurs).

Comme nous ne regarderons plus le PIB comme seule boussole, nous pourrons aller vers une démarchandisation du monde, qui commence par ces 3 propositions de Bernard Perret (la première rassemblant quelques-unes de mes propositions précédentes) :

1) Une politique de limitation des besoins monétaires
Allonger la durée de vie des biens (normes techniques et réglementation), faciliter leur réparation, informer les consommateurs sur le vrai prix d’usage.
Instaurer une tarification progressive des services essentiels (eau et électricité).
Rendre possible une vie sans voiture (à travers l’aménagement de l’espace et une offre de services adaptée)
Accompagner le développement de l’économie collaborative ainsi que des pratiques d’auto-production et de troc. 
Encadrer et limiter la publicité commerciale.

2) Une politique du temps au service de la pluralisation de l’activité
Organiser la transition travail-retraite et l’activité sociale des retraités (ouvrir un droit à un revenu garanti et/ou à une préretraite progressive à partir de 50 ans, ces droits étant assortis d’incitations à s’engager dans des activités d’utilité sociale). 
Limiter la colonisation du temps par les activités marchandes et le travail rémunéré (par exemple le travail de nuit et le dimanche).

3) Le développement du service civique et l’instauration d’un service public collaboratif
Une politique de démarchandisation aura pour effet pervers de réduire les recettes fiscales. Elle a donc logiquement pour contrepartie une politique de dé-monétarisation des services collectifs, qui pourrait se concrétiser notamment par une relance plus ambitieuse du service civique et par le développement d’un service public collaboratif mettant en œuvre de nouvelles formes de coopération entre les administrations, les associations et les citoyens volontaires, dans des domaines tels que l’éducation, les services sociaux, voire même (dans des conditions à définir soigneusement) la sécurité.

mercredi 16 novembre 2016

économie circulaire


Dans The Economics of the Coming Spaceship Earth (L'Économie du futur vaisseau spatial Terre), publié en 1966, Kenneth Boulding* écrit qu'il faut se détacher de la « Cow Boy economy » (économie du gaspillage, dans laquelle la maximisation de la consommation repose sur la prédation et le pillage des ressources naturelles) pour se rapprocher de la « Spaceman economy » : la Terre est devenue un vaisseau spatial unique, pourvu de ressources limitées dans lesquelles puiser, sans possibilité de ravitaillement, et avec des capacités limités à absorber nos polluants.
Changement de paradigme : fin de l'économie linéaire et promotion de l'économie circulaire, ainsi définie par l'ADEME : Système économique d’échange et de production qui, à tous les stades du cycle de vie des produits (biens et services), vise à augmenter l’efficacité de l’utilisation des ressources et à diminuer l’impact sur l’environnement tout en développant le bien être des individus.



L'ADEME résume ainsi les actions liées à l'économie circulaire :
Reste que l'économie circulaire atteint ses limites, notamment pour l'utilisation des métaux, comme analysé par Philippe Bihouix : les métaux ne sont pas renouvelables (renouvellement en dizaines de millions d'année), certains sont peu recyclables (par exemple le lithium), d'autres ont des usages majoritairement dispersifs (par exemple le titane), ou subissent une dégradation fonctionnelle lors du recyclage.

C'est pourquoi le développement de l'économie circulaire doit se prolonger par l'âge des low techs.

dimanche 13 novembre 2016

le convivialisme

Je reprends ici de grandes parties de l'abrégé du manifeste convivialiste, que je vous conseille dans son intégralité :

Déclaration d’interdépendance

Jamais l’humanité n’a disposé d’autant de ressources matérielles et de compétences techniques et scientifiques. Prise dans sa globalité, elle est riche et puissante comme personne dans les siècles passés n’aurait pu l’imaginer. Rien ne prouve qu’elle en soit plus heureuse. Mais nul ne désire revenir en arrière, car chacun sent bien que de plus en plus de potentialités nouvelles d’accomplissement personnel et collectif s’ouvrent chaque jour.
Pourtant, à l’inverse, personne non plus ne peut croire que cette accumulation de puissance puisse se poursuivre indéfiniment, telle quelle, dans une logique de progrès technique inchangée, sans se retourner contre elle-même et sans menacer la survie physique et morale de l’humanité. Les premières menaces qui nous assaillent sont d’ordre matériel, technique, écologique et économique. Des menaces entropiques. Mais nous sommes beaucoup plus impuissants à ne serait-ce qu’imaginer des réponses au second type de menaces. Aux menaces d’ordre moral et politique. À ces menaces qu’on pourrait qualifier d’anthropiques.

Le problème premier

Le constat est donc là : l’humanité a su accomplir des progrès techniques et scientifiques foudroyants, mais elle reste toujours aussi impuissante à résoudre son problème essentiel : comment gérer la rivalité et la violence entre les êtres humains ? Comment les inciter à coopérer tout en leur permettant de s’opposer sans se massacrer ? Comment faire obstacle à l’accumulation de la puissance, désormais illimitée et potentiellement auto-destructrice, sur les hommes et sur la nature ? Si elle ne sait pas répondre rapidement à cette question, l’humanité disparaîtra. Alors que toutes les conditions matérielles sont réunies pour qu’elle prospère, pour autant qu’on prenne définitivement conscience de leur finitude.
[...]

Considérations générales :

Le seul ordre social légitime universalisable est celui qui s’inspire d’un principe de commune humanité, de commune socialité, d’individuation, et d’opposition maîtrisée et créatrice.
Principe de commune humanité : il n’y a qu’une seule humanité, qui doit être respectée en la personne de chacun de ses membres.
Principe de commune socialité : les êtres humains sont des êtres sociaux pour qui la plus grande richesse est la richesse de leurs rapports sociaux.
Principe d’individuation : dans le respect de ces deux premiers principes, la politique légitime est celle qui permet à chacun d’affirmer au mieux son individualité singulière en devenir, en développant sa puissance d’être et d’agir sans nuire à celle des autres.
Principe d’opposition maîtrisée et créatrice : parce que chacun a vocation à manifester son individualité singulière il est naturel que les humains puissent s’opposer. Mais il ne leur est légitime de le faire qu’aussi longtemps que cela ne met pas en danger le cadre de commune socialité qui rend cette rivalité féconde et non destructrice.

De ces principes généraux découlent des :
Considérations morales 
Ce qu’il est permis à chaque individu d’espérer c’est de se voir reconnaître une égale dignité avec tous les autres êtres humains, d’accéder aux conditions matérielles suffisantes pour mener à bien sa conception de la vie bonne, dans le respect des conceptions des autres
Ce qui lui est interdit c’est de basculer dans la démesure (l’hubris des Grecs), i.e. de violer le principe de commune humanité et de mettre en danger la commune socialité
Concrètement, le devoir de chacun est de lutter contre la corruption.
Considérations politiques
Dans la perspective convivialiste, un État ou un gouvernement, ou une institution politique nouvelle, ne peuvent être tenus pour légitimes que si :
- Ils respectent les quatre principes, de commune humanité, de commune socialité, d’individuation et d’opposition maîtrisée, et que s’ils facilitent la mise en œuvre des considérations morales, écologiques et économiques qui en découlent ;
Plus spécifiquement, les États légitimes garantissent à tous leurs citoyens les plus pauvres un minimum de ressources, un revenu de base, quelle que soit sa forme, qui les tienne à l’abri de l’abjection de la misère, et interdisent progressivement aux plus riches, via l’instauration d’un revenu maximum, de basculer dans l’abjection de l’extrême richesse en dépassant un niveau qui rendrait inopérants les principes de commune humanité et de commune socialité ;
Considérations écologiques
L’Homme ne peut plus se considérer comme possesseur et maître de la Nature. Posant que loin de s’y opposer il en fait partie, il doit retrouver avec elle, au moins métaphoriquement, une relation de don/contredon. Pour laisser aux générations futures un patrimoine naturel préservé, il doit donc rendre à la Nature autant ou plus qu’il ne lui prend ou en reçoit.
Considérations économiques
Il n’y a pas de corrélation avérée entre richesse monétaire ou matérielle, d’une part, et bonheur ou bien-être, de l’autre. L’état écologique de la planète rend nécessaire de rechercher toutes les formes possibles d’une prospérité sans croissance. Il est nécessaire pour cela, dans une visée d’économie plurielle, d’instaurer un équilibre entre Marché, économie publique et économie de type associatif (sociale et solidaire), selon que les biens ou les services à produire sont individuels, collectifs ou communs.
[...]

samedi 12 novembre 2016

justice et prison sans barreaux

Je repars de la finalité des sanctions prononcés par le justice, précédemment listées ainsi:
  • protection de la société : rassurer et protéger la société en mettant à l'écart les fauteurs de troubles pour les empêcher de nuire.
  • éducation : punir le fautif pour lui faire prendre conscience de la gravité de ses actes, et lui apprendre à mieux se comporter; l'aider à trouver sa place dans la société dans le respect des lois.
  • réparation : tenter de dédommager les victimes, compenser les préjudices subis.

Cette infographie du Monde montre pourquoi l'incarcération ne peut être la seule réponse aux délits :
En résumé : nos prisons sont sur-peuplées de détenus peu éduqués, majoritairement dépressifs, dépendants de substances addictives, et/ou souffrant de troubles psychotiques.
Adeline Hazan, contrôleuse générale des lieux de privation de liberté le déclare : “Plus on construira de places de prison, plus elles seront occupées”.

La prison devrait être réservée à la fonction de protection de la société. Cela doit être réservé aux individus dangereux, avec probabilité élevée de récidive.
Tous les autres cas devraient être traités autrement.
Les personnes atteintes de troubles psychotiques doivent être soignées : est-il nécessaire qu'ils soient incarcérés pour cela ?
Les personnes ayant commis des délits en lien avec une addiction (alcool, drogues) pourront passer un contrat par lequel ils s'engagent à une désintoxication contraignante.
Les troubles de l'humeur, syndrome dépressif et anxiété généralisée notamment, me paraissent plutôt une conséquence de l'incarcération qu'une cause de délit.
Je pense donc que pour l'incarcération d'une partie des détenus n'est pas bénéfique pour la société, car elle génère des troubles psychiatriques, et éventuellement accentue des addictions.

Face à ce constat, au delà des alternatives à l'emprisonnement évoquées plus tôt, on peut aussi imaginer des prisons « ouvertes », sans barreaux, avec un taux d’évasion inférieur à celui des prisons fermées, des prisons où tous les détenus ont un travail rémunéré, où le taux de récidive après la sortie est 2 à 3 fois moins important que pour les détenus passés par les prisons fermées, des prisons où, à la sortie, les détenus libérés trouvent des solutions d’insertion préparées pendant le temps de la détention, des prisons où l’on compte moins de suicides qu’ailleurs, des prisons qui coûtent beaucoup moins cher aux contribuables que les prisons fermées. Ce n'est pas une utopie, cela existe dans une bonne partie de l'Europe. Le créateur de la toute première expérience de prison ouverte, en 1834, avait inscrit au fronton de l’entrée cet avis : « Ce pénitencier ne reçoit que des hommes. Le crime reste à l’extérieur ».
Le système n'est certainement pas adapté à tous les détenus, mais mérite d'être étudié.

école : renforcer les compétences psychosociales chez nos enfants

On l'a vu : notre école est malheureusement trop souvent une machine à saper la confiance et l'audace que les enfants ont en eux, à enfermer les enfants (et les adultes qu'ils seront) dans des catégories établies, et à en faire de consommateurs passifs, envieux et craintifs.

Pour ré-orienter l'école vers autre chose, en plus des programmes scolaires et des méthodes éducatives, il faudrait fixer à l'école l'objectif de renforcer les compétences psychosociales ainsi définies par l'OMS :
"Les compétences psychosociales sont la capacité d'une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves de la vie quotidienne. C'est l'aptitude d'une personne à maintenir un état de bien-être mental, en adoptant un comportement approprié et positif à l'occasion des relations entretenues avec les autres, sa propre culture et son environnement."

Ces compétences sont :
Derrière le même concept de "life skills", on retrouve différentes définitions :
L'école doit donner confiance aux enfants, et ancrer en eux l'idée qu'un échec est une occasion de progresser. Les enseignants trouveront ici quelques bonnes pistes : indispensable.

jeudi 10 novembre 2016

gauche ou droite ? écolo-centriste !

Cette saison de primaires me renvoie à cette interrogation...

En 2011, la primaire de la gauche demandaient de signer : «Je me reconnais dans les valeurs de la gauche et de la République, dans le projet d'une société de liberté, d'égalité, de fraternité, de laïcité, de justice et de progrès solidaire ».

"valeurs de la gauche" : lesquelles? Si j'en croie Wikipedia (dont je me méfie) : les valeurs suivantes sont généralement considérées comme étant de gauche : égalité, solidarité, progrès, insoumission. La Toupie affirme : les valeurs généralement considérées comme de gauche sont la justice sociale, l'égalité, la solidarité, l'humanisme, la laïcité, tandis que la droite met en avant l'ordre, le travail, la famille et la responsabilité individuelle.
"valeurs de la République" : oui mais... même si je pense qu'un roi héréditaire sera mieux à même d'avoir une vision politique à long terme qu'un élu prochainement candidat.
"liberté, égalité, fraternité", mais je préférerais "responsabilité, équité, fraternité" : je crois en l'égalité des droits et en l'inégalité des devoirs, et je suis favorable à l'équité. Je reste persuadé que c'est l'indiscutable diversité des talents, inégalement répartis et inégalement mis en œuvre, qui permet d'avoir comme idéal l'aristocratie véritable : le gouvernement des meilleurs.
"le progrès" : non si cela inclut le progrès technique pour lui même.


En 2016, la primaire de la droite et du centre demande de s'engager sur l’honneur en signant la phrase suivante : « Je partage les valeurs républicaines de la droite et du centre et je m’engage pour l’alternance afin de réussir le redressement de la France ».


"valeurs de la droite et du centre" : c’est quoi «les valeurs de la droite et du centre»? cela veut-il dire que les valeurs de la droite sont celles du centre? ou que l'on doit partager les valeurs de la droite et les valeurs du centre?? Si j'en croie Wikipedia (dont je me méfie) : usuellement, les valeurs suivantes sont considérées comme étant caractéristiques de la droite : mérite, ordre, sécurité, tradition, conservatisme. Valeurs que je partage peu. En 2012, l'Obs avait enquêté : responsabilité, liberté, solidarité, courage, humanisme, autorité, réalisme, patriotisme, ordre, espoir, égalité...
Du côté des valeurs du centre, on lit des choses comme : primauté de l'humain, équité, unité, liberté, solidarité, respect, tolérance, responsabilité, fraternité universaliste... Je m'y retrouve beaucoup plus.
"m'engager pour l’alternance" : vouloir que les choses changent : oui !
"réussir le redressement de la France" : cela reste vague. Si cela consiste à vouloir retrouver la croissance du PIB à tout prix, très peu pour moi.

En 2016, la primaire de gauche demande de signer "Ma signature sur cette liste d’émargement vaut engagement de reconnaissance dans les valeurs de la Gauche et des écologistes dont j’ai pris connaissance". Et là on trouve une petite cartographie :

sur laquelle je m'empresse d'évaluer mon degré de compatibilité :

En 2011, 2 chartes étaient à signer pour pouvoir voter à la primaire écologiste : la Charte mondiale des Verts (développement soutenable, démocratie participative, non-violence...) et les valeurs d'EELV (défense de la biodiversité, devoir d’accueil et de solidarité, droit au temps libre et à l’épanouissement). Que du bonheur.

En 2016, la primaire d'Europe-Ecologie-les-Verts, beaucoup moins ouverte que celles de la droite et du centre ou de la gauche, a aussi sa charte, beaucoup moins sexy et graphique que leurs camarades de la Belle Alliance.
Relisant les 32 points attentivement, j'acquiesce à (presque) tous. 3 d'entre eux me posent question :
23. L’affirmation du féminisme comme valeur émancipatrice pour les femmes comme pour les hommes. Il me semble que c'est la reconnaissance de l'altérité sexuelle et de la complémentarité hommes/femmes qui nous fait égaux en droits donc en liberté, et co-responsables. Je ne sais pas si c'est contradictoire avec ce point n°23...
28. Le refus du nucléaire militaire et l’engagement en faveur de la sortie du nucléaire civil. Plutôt oui pour la première partie de la phrase, mais réservé pour la seconde partie. Engagement en faveur de la sortie du nucléaire civil oui, mais pas le plus vite possible et à n'importe quel prix. Peut-être sommes-nous dans une période où le nucléaire civil est le moins pire des choix pour réaliser la transition vers une société moins consommatrice d'énergie, sans que le période transitoire n'empoisonne plus l'atmosphère en gaz à effet de serre.
30. La défense de la démocratie face aux dérives des solutions autoritaires, même au nom d’ “une sauvegarde urgente de la planète”. Tout à fait d'accord avec la première partie de la phrase, mais je n'avais pas envisagé la seconde partie... Dominique Bourg parlait pourtant dès 1996 des trois scénarios de l'écologie : fondamentaliste, autoritaire ou démocratique.

Bilan de ce petit jeu : je suis écolo-centriste joyeux !