mercredi 24 janvier 2018

Pourquoi vouloir réduire les inégalités ?

Je propose dans mon petit programme de voter dans les lois de finance un objectif concernant les coefficients de Gini de répartition des revenus et du patrimoine (c'est-à dire de piloter le niveau d'inégalité), je propose également de réduire les écarts de salaires et d'instaurer une allocation universelle (ou revenu de base), et l'un des intérêts que je vois à la Taxe à l'Actif Net est qu'il peut être plus progressif que notre actuel impôt sur le revenu et ainsi mieux assurer la fonction redistributive.

Mais pourquoi vouloir réduire les inégalités? philanthropie pure??

On a vu plus tôt que le bien-être moyen d'une population augmente avec son niveau de revenu moyen, mais que cela plafonne : on note par exemple que au delà d'un PIB de 7000$/habitant en parité de pouvoir d'achat (dollars de 1995), les populations sont à peu près aussi heureuses quel que soit leur PIB par habitant.
Au delà d'un seuil, le bien-être d'une population n'augmente plus avec son niveau de revenu moyen, mais les problèmes augmentent avec les inégalités de revenus.

Démonstration chiffrée à l’appui, deux épidémiologistes britanniques, Wilkinson et Picket, affirment que l’inégalité des revenus est le principal obstacle à la santé et au bonheur des habitants des pays développés dans leur étude intitulée "pourquoi l'égalité est meilleure pour tous".

Leur étude montre que les problèmes sociaux et sanitaires sont plus importants dans les sociétés inégales :
et que ces problèmes sociaux (dans les pays riches) ne sont pas corrélés au revenu moyen :
Ceci est vérifié sur un indice agglomérant les données de différents indicateurs sociaux et sanitaires, mais également sur ces indicateurs considérés séparément. État de santé, espérance de vie, obésité, santé mentale, taux d’incarcération ou d’homicide, toxicomanie, grossesses précoces, succès ou échecs scolaires, bilan carbone et recyclage des déchets, mobilité sociale, tous les chiffres vont dans le même sens : l’inégalité des revenus nuit de manière flagrante au bien-être de tous. Conclusion des auteurs : « Ce n’est pas la richesse qui fait le bonheur des sociétés, mais l’égalité des conditions ».
Vous pouvez trouver cette démonstration en slides ou en causerie TED, les auteurs allant jusqu'à des pistes d'action :

Qu'on mesure l'inégalité par un coefficient de Gini ou par le rapport des revenus des 20% les plus riches sur ceux des 20% les plus pauvres, on constate que dans les pays dits développés comme le notre, l'inégalité est source de problèmes sociaux et sanitaires.

L'inégalité a donc un coût pour la société. Pour le Royaume-Uni par exemple, Equality trust a calculé ici que le coût annuel total de l'inégalité peut être estimé équivalent à 39 milliards de livres, soit près de 45 milliards d'euros. Cela représente 622£/an (soit 714€/an) pour chaque homme, femme et enfant.
Exprimé différent, une étude de Cédric Houdré , Emmanuel L'hour, et Guillaume Rateau conclut que la France gaspille environ 19% de son niveau de vie en inégalités de revenus.

De manière assez utilitariste, diminuer les inégalités devraient donc permettre de diminuer le coût de ces inégalités supporté par l'ensemble de la société.

Avec les données des différents pays étudiés par Wilkinson et Picket, j'aimerais pouvoir construire une courbe de coût des inégalités en fonction de leur niveau d'inégalité. Cela devrait nous aider à identifier la cible de coefficient de Gini des revenus (ou des patrimoines) permettant d'optimiser le coût des inégalités.

Bien entendu, je ne nie pas qu'un minimum d'inégalités est nécessaire pour dynamiser l'économie sans impacter sur le bien-être moyen de la population : il faut qu'il y ait des incitations à travailler, à faire des effort, à exceller, et la hausse potentielle de revenu est une incitation efficace à prendre des risques même si il serait triste qu'elle soit la seule. A ce propos, un rapport du FMI conclut qu'un niveau d'inégalité faible est corrélé de manière robuste avec une croissance plus rapide et plus durable. Mais je rappelle que mon propos ici n'est pas d'optimiser le taux d'inégalité pour maximiser le taux de croissance du PIB, indicateur que je réfute, mais pour maximiser le bien-être de la population et minimiser le coût des problèmes sociaux et sanitaires induits par les inégalités.

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